Comment la France est-elle devenue vaccinophobe ?

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Les polémiques vaccinales ont toujours existé et sont apparues dès la première tentative de vaccination contre la variole. Elles se sont particulièrement développées en France, sur de nombreux thèmes et pour de nombreux vaccins. Un article récent montrait que la population française était celle en Europe qui manifestait le plus de crainte ou de défiance vis-à-vis des vaccins [1]. Il est intéressant de se pencher sur notre société et sur le monde médical pour essayer de comprendre ce qui a porté aussi haut ce sentiment dans notre pays. Le sociologue Josselin Raude analyse de façon pertinente les différents aspects de notre société et permet de nous éclairer [2].

Un des premiers facteurs, commun au monde entier, mais particulièrement développé en France est la défiance de principe de la population vis-à-vis de ses “élites”, de ses “sachants”, de ses “experts” ou de ses “responsables”. Pour cela, la situation française est particulière suite aux différents scandales, souvent très médiatisés depuis les années 1970 avec en particulier, celui du “sang contaminé” en 1991, qui est probablement un de ceux qui a le plus marqué notre population en indiquant à ce moment que l’État pouvait faillir et qu’il pouvait être remis en question dans ses décisions et dans sa compétence, voire dans sa loyauté.

Les autorités politiques, traditionnellement paternalistes et maladroites sont devenues pendant de nombreuses années, absentes des débats, par crainte d’être interpellées et éventuellement jugées dans leurs décisions de santé publique. La reprise récente du débat de leur part était devenue peu audible et il faudra attendre l’arrivée de notre nouvelle ministre, Madame Agnès Buzyn, pour qu’une autorité à la fois politique, scientifique et médicale, s’exprime avec clarté et sens, et puisse à nouveau être crédible et entendue dans notre pays.

Les agences sanitaires qui se sont senties également discréditées du fait des différents scandales des 20 dernières années, ont été longtemps silencieuses sinon inaudibles et vivaient encore récemment dans une crainte permanente devant toute prise de décision.

Les autorités scientifiques ou les experts sont également devenus progressivement désavoués et délégitimés du fait du développement d’un mouvement de suspicion systématique et général de lien d’intérêt avec l’industrie pharmaceutique. Ce mouvement est mondial et noyé aujourd’hui dans la thèse populaire du “grand complot”, mais il est particulièrement important dans notre pays par comparaison avec les autres pays européens et anglo-saxons.

Une caractéristique semble-t-il également spécifique à la France est son déficit de culture et de formation scientifique portant à la fois sur l’épidémiologie, l’immunologie et les statistiques, sciences indispensables pour comprendre quoi que ce soit à la[...]

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À propos de l’auteur

Service de Pédiatrie générale, Hôpital Armand-Trousseau, PARIS. Université Pierre-et-Marie-Curie, Paris VI, PARIS. Groupe de Pathologie infectieuse pédiatrique de la Société Française de Pédiatrie.